Stocks : un Actif bien passif… ou : « Comment infailliblement assécher sa trésorerie en perdant la maîtrise de ses stocks »

Préambule : Dans les industries de biens d’équipement, les stocks sont un révélateur infaillible des forces et faiblesses de l’Entreprise et de son potentiel pour rebondir … quand il n’est pas trop tard ! 

Les interventions que nous conduisons en Entreprise nous amènent invariablement à constater une perte d’actif issue des stocks qui peut être fatale.  

Véritable bombe à retardement cette perte s’accompagne souvent d’un accroissement anormal de la dette Fournisseurs et aboutit finalement à une perte équivalente des fonds propres, qui accélère la cessation de paiements et le dépôt de bilan…  

Dans ces quelques lignes, bien que déclinées sur le mode badin, vous serez interpellé de la façon la plus sérieuse par des questions apparemment futiles mais toutes soulevées par des expériences réelles : enjoy ! 

 

Un stock, à quoi ça sert ?   

En principe les stocks concernent des marchandises ou produits accumulés par l’entreprise et dédiés à la vente. Rien de bien original, semble-t-il, mais déjà sujet à des questions de bon sens : 

  • Pourquoi ne sont-ils pas encore vendus ? Y a- t- il des commandes clients en regard du stock (production à la commande) ou sont-elles « attendues » (production sur prévision) ? 
  • Dans le cas de production à la commande, quel peut être le niveau maximum tolérable d’un tel stock, par exemple en mois de Chiffre d’Affaires ou de semaines de production  ? 
  • Dans le cas de prévisions, celles-ci sont-elles élaborées de façon concertée et périodique avec le commercial (représentant le Client) sous l’égide de la Direction Générale, puisqu’il s’agit d’un engagement financier porté par l’Entreprise ? 
  • Dans la négative, sur quelles bases les stocks constatés ont-ils été accumulés et qui en porte la responsabilité ?  

 

Qui se soucie vraiment des stocks ? 

  • Le niveau des stocks, l’engagement des achats et de la fabrication sur quelques semaines glissantes sont-elles un indicateur surveillé par la Direction Générale ? 
  • L’Entreprise dispose-t-elle d’une procédure d’inventaire à jour? Celui-ci est-il réalisé sous le contrôle physique de la Direction ? Y a-t-il une procédure stricte de l’évaluation et la déclaration de, l’obsolescence ? Quel est le montant de la destruction de valeur correspondante du dernier exercice, et la prévision pour l’exercice en cours ? 
  • En cas d’inventaire permanent (inventaire tournant), la direction valide-t-elle le journal des régularisations (souvent sous contrôle des informaticiens, voire au mieux du contrôleur de gestion !) 
  • En cas d’inventaire physique, alors que tout le monde se polarise sur la valorisation des écarts, qui se soucie de l’indicateur plus représentatif qui est : somme des valeurs absolues des écarts (en plus ou en moins) ramenée au entrées de stocks sur la période entre deux inventaires?  

Dans le cas improbable où certaines de ces questions, ramenées à votre entreprise, restent sans réponse claire, vous,  Dirigeant, êtes peut-être en danger. En voici les raisons et quelques pistes d’espoir : 

1)      La tendance naturelle des acteurs de l’Entreprise à augmenter les stocks  

Alors que vous avez une claire conscience que les stocks représentent du cash immobilisé sur les rayons de vos entrepôts, sachez que vous êtes en minorité dans votre propre entreprise. Pour la majorité de vos collaborateurs, le stock est une bonne chose ! Ils permettent en effet de :  

-  se prémunir d’une rupture de matière première ou de fournisseurs ne respectant pas leurs délais de livraison…! 

-  bénéficier de conditions d’achat avantageuses en augmentant les volumes achetés 

- avoir du produit en stock pour servir le Client, quelle que soit sa demande ! 

- pallier une baisse des commandes (forcément passagère) en « produisant du stock » pour maintenir l’activité, 

- couvrir les aléas de transport, de douanes pour les marchandises importées de pays lointains (Chine…) 

- afficher un beau résultat d’exploitation ! 

– afficher un bel actif de bilan ! 

 

Enfin : qui est responsable du stock ?  

-  sûrement pas les acheteurs : ils ont acheté ce qui leur était demandé par le Calcul des Besoins issu du nouvel ERP qui a coûté si cher ! 

- encore moins le producteur : il a produit ce qu’il fallait pour répondre à la demande. De plus il a judicieusement apporté de la valeur ajoutée à toute la matière première qui s’accumulait en excès dans les entrepôts, permettant ainsi de faire de la « productivité » ! 

- évidemment pas le commercial : il est là pour ramener des commandes et en plus les demandes clients …ne sont JAMAIS disponibles en stock !  

2)      Une démarche pédagogique sur le long terme 

-  des billets de banques sur les étagères : cette image souvent rapportée dans nos diagnostics n’émeut finalement pas grand monde, à part parfois le Directeur Financier. C’est le résultat de l’inculture financière qui règne souvent dans l’Entreprise.  

- Dire que le montant du stock correspond à autant de trésorerie, d’investissement,  pour 
l’Entreprise est souvent moins percutant que de comparer la valeur d’un stock déprécié en nombre de Clio détruites pour aider vos collaborateurs à prendre conscience du bouclage vertueux entre les flux matériels et les flux financiers.        

3)      Tout cela est-il bien « Lean » ? 

La bonne nouvelle est que vous n’êtes pas seul à porter cet acte de foi ! Vous avez en effet deux aides de poids : 

 -  le Lean Management vient à votre rescousse ! En effet, le « Lean », dont votre Directeur Industriel potasse les vertus en cachette, incite à : 

  • Produire le juste nécessaire 
  • Éliminer les gaspillages tout au long du cycle de production, en éliminant toutes les « non-valeur ajoutées » 

Mais attention : Le Lean encourage de même les cadres à sortir des bureaux et descendre dans les ateliers pour supporter de manière durable les soucis et les idées des opérateurs qui eux ont une 
perception aigüe et concrète des problèmes du terrain ! Vous trouverez d’ailleurs dans les allées de vos entrepôts de stockage des opérateurs (trices) très conscients des excès de matières stockées et regorgeant d’idées pour améliorer votre BFR ! 

- et ces mêmes opératrices, telle la bonne mère de famille 

  • Elle ne va pas au supermarché tant que le salaire n’est pas versé, 
  • Elle ne remplit pas son réfrigérateur de yaourts en début de mois, 
  • Et enfin elle ne fait ses courses que sur la base de listes précises des menus à fournir pour la semaine à venir !  

Dans une deuxième partie, deux thèmes mériteraient d’être approfondis :  

-  la nécessité d’une supply chain efficace : véritable épine dorsale de l’Entreprise,elle conjugue la tendance naturelle de vos collaborateurs à travailler en « silo ». 

– la prévision :   « prévoir c’est risquer de se tromper, ne pas prévoir c’est se tromper avec certitude ! » 

 Boucler un système de prévisions périodiques entre tous les acteurs de l’Entreprise permet d’objectiver les enjeux et établir un consensus envers les décisions stratégiques de production. 

D’ici là n’hésitez pas à porter vos commentaires et vos expériences dans ce blog!